Les positions des pays africains seront décisives pour les propositions visant à lutter contre le finning et à interdire la pêche des requins-taupes bleus de l’Atlantique en danger d’extinction
Novembre 2019. Les défenseurs de l’environnement espèrent voir l’Afrique montrer l’exemple à l’occasion d’une réunion internationale sur la pêche qui pourrait changer radicalement l’avenir des requins-taupes bleus en danger d’extinction et contribuer à éviter le finning (c’est-à-dire le prélèvement des ailerons d’un requin et le rejet de sa carcasse à la mer). Lors de cette réunion qui se tiendra du 18 au 25 novembre à Majorque, la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA) examinera au moins deux propositions relatives à la conservation des requins : la première interdirait la rétention à bord des requins-taupes bleus, victimes d’une forte surpêche comme le montrent de nouvelles recommandations scientifiques préoccupantes, tandis que la seconde imposerait que tous les requins débarqués aient les nageoires encore attachées au reste de la carcasse afin de contrôler plus facilement l’interdiction du finning. Le Sénégal a proposé la première et sera co-auteur de la seconde comme 21 autres Parties à la CICTA.
Parmi les 53 Parties à la CICTA, le Maroc est le deuxième pays qui débarque le plus de requins-taupes bleus de l’Atlantique nord alors que cette population est épuisée. La Commission sous-régionale des pêches, basée au Sénégal, encourage ses autres États membres — le Cap Vert, la Gambie, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Mauritanie et la Sierra Leone — à défendre la proposition introduite par le Sénégal d’interdire tout débarquement de requins-taupes bleus. Le Liberia a déjà apporté son soutien à cette proposition.
« Nous félicitons le Sénégal pour son leadership indéfectible sur les questions de conservation internationale des requins et, plus particulièrement, pour sa proposition essentielle d’interdire la capture des requins-taupes bleus, comme le recommandent les scientifiques », déclare Ali Hood, directrice de la conservation pour le Shark Trust. « La CICTA se trouve à un moment décisif en ce qui concerne la gestion de la pêche des requins ; les positions des pays d’Afrique — en particulier celle du Maroc — pourraient jouer un rôle déterminant, soit en faisant en sorte que la CICTA abandonne une fois de plus ces espèces vulnérables à leur sort, soit en l’orientant vers des décisions responsables qui constitueront des précédents positifs à l’échelle mondiale. »
Le requin-taupe bleu est un requin particulièrement intéressant sur le plan économique, et il est ciblé pour sa chair, ses nageoires et dans le cadre de la pêche sportive. Sa croissance lente le rend particulièrement vulnérable en cas de surpêche. Les scientifiques de la CICTA avertissent que la reconstitution des requins-taupes bleus de l’Atlantique nord prendrait environ 25 ans même si plus aucun de ces requins n’était capturé. Ils recommandent que les pêcheurs aient l’interdiction de conserver à bord les requins-taupes bleus issus de cette population.
Le Bénin, le Burkina Faso, le Cap-Vert, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, le Gabon, la Gambie, le Liberia, le Mali, le Niger, le Nigeria, le Sénégal, le Soudan, le Tchad et le Togo ont été co-auteurs d’une proposition, adoptée en août, d’inscrire les requins-taupes bleus (et les petits requins-taupes) à l’Annexe II de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) en août. Les Parties à la CITES (qui incluent toutes les Parties à la CICTA) devront prouver au plus tard fin novembre que leurs exportations de requins-taupes bleus proviennent de pêcheries durables et légales. En mars, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a classé les deux espèces de requins-taupes dans la catégorie des espèces en danger d’extinction sur sa Liste rouge.
« Le soutien écrasant à l’inscription des requins-taupes bleus à la CITES montre que la fin de la surexploitation des requins bénéficie d’un intérêt international croissant », déclare Sonja Fordham, présidente de Shark Advocates International. « Notre attention se porte aujourd’hui sur les organisations de pêche pour qu’elles exécutent ces engagements et d’autres encore. Il est essentiel que des avancées se produisent au sein de la CICTA, mais cela dépend également d’autres Parties, dont de nombreux pays africains, qui devront suivre la position du Sénégal pour protéger les requins-taupes bleus et éviter le finning. »
L’interdiction du finning des requins par la CICTA repose sur le calcul complexe d’un rapport de poids entre nageoires et carcasses. Le fait d’imposer que les requins soient débarqués avec leurs nageoires attachées est le moyen le plus fiable d’appliquer les mesures d’interdiction du finning. La plupart des Parties à la CICTA soutiennent les politiques « nageoires attachées ». L’Afrique du Sud, le Cap Vert, le Gabon, le Ghana, São Tomé-et-Príncipe, le Sénégal et la Sierra Leone sont co-auteurs de la proposition. L’opposition du Japon a fait obstacle à tout consensus jusqu’à présent.
Contact presse :
Shark Advocates International est un projet de The Ocean Foundation consacré à la mise en place de politiques fondées sur la science pour les requins et les raies. The Shark Trust est une association britannique dont la mission est de protéger l’avenir des requins grâce à des changements positifs. Les requins en danger et les débris marins sont au cœur de l’action de Project AWARE, un mouvement mondial de protection de l’océan animé par une communauté d’aventuriers. Ecology Action Centre agit pour la durabilité des moyens de subsistance qui dépendent de l’océan et en faveur de la conservation marine au Canada et dans le monde. Ces organisations, avec le soutien du Shark Conservation Fund, ont créé la Shark League pour promouvoir des politiques régionales responsables en matière de conservation des raies et des requins (www.sharkleague.org).